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Les Chinois vont-ils dévier l’eau du Tibet ?

par Jean-Paul Desimpelaere, le 12 mars 2009

En 2006, Guo Kai, ingénieur chinois expert en hydraulique, a imaginé un plan colossal : dévier 200 milliards de mètres cubes d’eau en provenance du Yarlung Tsangpo (le Brahmapoutre), du Lancang (le Salween) et du Nujiang (le Mékong) vers le Fleuve Jaune pour desservir les régions sèches du Nord de la Chine. Faire couler l’eau du Tibet vers le Nord de la Chine, est-ce réalisable?

 

Le professeur Guo Kai a été hué par les différentes instances scientifiques chinoises et par le gouvernement. Le ministre des « Affaires de l’eau », Wang Shucheng, lui-même ingénieur en hydraulique, déclara la proposition « absurde, irréaliste et non scientifique ». D'après lui,  dès que les crues atteignent 58 milliards de m³ d’eau, le Fleuve Jaune provoque des inondations.  « Si on y ajoute ne fut-ce que 50 milliards de m³, toutes les digues se brisent immédiatement. Que penser alors de 200 milliards de m³ supplémentaires ? », a-t-il décrété. « Il y a assez d’eau dans le Nord de la Chine, il faut trouver des solutions pour la mettre en réserve à plus grande échelle pendant la saison des pluies. Des travaux sont en cours pour cela », rajoute-t-il. (1)

 

Le Fleuve Bleu à Benzilan (frontière Sichuan-Yunnan) creuse de profondes vallées et commence à prendre de l’ampleur (photo JPDes., 2007)
Le Fleuve Bleu à Benzilan (frontière Sichuan-Yunnan) creuse de profondes vallées et commence à prendre de l’ampleur (photo JPDes., 2007)


Le ministre des Affaires Étrangères s’immisça également dans le débat en rappelant ceci : « Si nous diminuons l’acheminement en eau vers le Sud-est de l’Asie, cela occasionnerait des catastrophes naturelles à nos voisins du Sud. Il pourrait en résulter des conflits internationaux dont nous ne voulons pas. C’est aussi pour des raisons d’état que nous réfutons immédiatement et sans retour l’idée du professeur Guo. Il n’existera aucun plan allant dans son sens. » (2)
Entre-temps, le réseau international pro-dalaï-lama avait déjà fait circuler l’idée que la Chine se préparait à « voler l’eau du Tibet »... A l'annonce du rejet de ce projet pharaonique et irréaliste, les pro-dalaïstes n'ont pas cru bon de corriger, c'est pourquoi beaucoup d'entre nous ont encore dans la tête que la Chine « vole l'eau du Tibet en déviant les fleuves »... absurde ! Et auquel cas la Chine serait passée à l'acte, on aurait pu rétorquer qu'elle fait ce qu’elle veut avec son eau, il ne s’agit pas de « voler le Tibet » étant donné que celui-ci fait partie de la Chine. En Belgique, les flamands achètent de l'eau de Spa : wallonne !... et Evian se vend bien en Chine.

Note :
(1) et (2) CTIC 22/11/06