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Visite d'une école secondaire au Tibet

par Elisabeth Martens, le 6 novembre 2025

La dernière fois que j'ai eu l'occasion de visiter une école en région autonome du Tibet, c'était il y a quelques mois, en mai 2025. C'était une école secondaire dans la région de Gyanzé. J'ai été sidérée par la qualité de l'enseignement et par les nouvelles technologies mises à disposition des enseignants.

 

Nous avons été accueillis par le directeur dans la vaste cours centrale de l'école. Après la traditionnelle distribution des katang (écharpes de bienvenue), il nous mène directement vers le grand bâtiment des salles de classe. Sur le trajet, il nous explique que l'école compte actuellement 1652 élèves. Les distances étant énormes au Tibet, la plupart des élèves n'ont pas d’autre choix que l'internat. Ici, ce sont environ 1500 élèves qui restent loger à l'école, certains retournent chez eux pendant le week-end, d'autres uniquement pendant les congés nationaux. 

Cours centrale de l'école et bâtiment des classes
Cours centrale de l'école et bâtiment des classes

Le directeur nous fait entrer dans une classe où se déroule le cours de langue chinoise. Je compte une quarantaine d'élèves, deux par banc, à droite un garçon en uniforme bleu, à gauche une fille en uniforme rouge. La parité des genres semble respectée. L'enseignante est en train de décortiquer un poème classique de la dynastie des Tang. Certains élèves sont interrogés individuellement, puis tous ensemble, ils récitent le poème à voix haute. 

Un cours de langue chinoise
Un cours de langue chinoise

Nous passons à la classe de langue tibétaine. Un enseignant en habit traditionnel explique aux élèves une pratique agricole ancienne, un texte qui sert de support pour révéler les subtilité de la grammaire tibétaine. Il a à sa disposition un tableau numérique dont il tourne les pages en un geste allègre et théâtral. Même nombre d'élèves dans la classe, avec la même disposition, des rangées bleues et des rangées rouges.

Un cours de langue tibétaine
Un cours de langue tibétaine

Dans le couloir, en passant d'une classe à l'autre, le directeur nous explique que les cours de langues et de littératures chinoise et tibétaine sont obligatoires pour tous les élèves. L'enseignement est bilingue, mais les cours généraux de sciences, math, histoire, géographie, etc. sont donnés en chinois. Le bilinguisme dans l'enseignement est la norme au Tibet, depuis la première primaire et ce, jusqu'à la fin des secondaires inférieures (de 6 à 16 ans). À partir de la 3ème année primaire s'ajoute un cours d'anglais obligatoire. C'est le comité du PCC de l'école qui décide de l'orientation générale de l'enseignement, comme cela se passe partout en Chine, précise le directeur.

Puis, c'est un atelier de technologie qui nous attend. Sur la table sont exposés des modèles miniatures d'éoliennes, de voitures avec panneaux solaires, d'antennes satellite, d'antennes de gsm, etc. Le directeur nous montre fièrement le trophée de l'école : un drone miniature pour lequel les élèves de technique ont gagné un deuxième prix au niveau national. Ils ont dû imaginer les différents éléments du drone, les dessiner sur PC, les faire réaliser par une imprimante 3D, puis assembler les éléments pour actionner le drone.

Le drone qui a gagné le 2ème prix de technologie au niveau national
Le drone qui a gagné le 2ème prix de technologie au niveau national


Dans la classe de calligraphie tibétaine, l'enseignant nous apprend que les élèves qui restent en internat ont un large choix de cours à option, ceci pour ne pas laisser les pensionnaires aller au désœuvrement. Outre la calligraphie tibétaine ou chinoise, il y a des options de musique – guitare, chant chorale, piano, synthé, etc.- des cours de danses, de théâtre, des cours de sport – basket, ping-pong, foot, etc. En tout c'est un éventail de 18 cours à option qui leur est proposé. 

Classe de calligraphie tibétaine
Classe de calligraphie tibétaine

Nous demandons alors à voir les dortoirs des pensionnaires. Quatre bâtiments d'un étage sont disposés en enfilade, chaque bâtiment compte 50 chambres d’environ 8 mètres sur quatre. Par rapport au niveau de l'école, c'est assez spartiate, comme à l'ancienne : quatre lits superposés et 2 armoires à casiers par chambre, soit huit élèves et leur matériel. Ce n'est vraiment pas le luxe ! Par contre, la cantine propose tous les jours trois menus différents – déjeuner, dîner et souper - annoncés sur le panneau accroché à l'entrée du réfectoire, à côté des certificats de santé des cuistots, obligatoires pour la sécurité sanitaire.

En sortant, la récréation de 10h bat son plein sur le vaste terrain de sport. Le directeur nous apprend encore que l'enseignement est gratuit pour tous, comme partout au Tibet, et que les enfants issus de milieux défavorisés ont droit aux quatre garanties: logement, repas, fournitures scolaires et enseignement.

Notre équipe compte un prof de math en secondaire. Il se dit particulièrement impressionné par la discipline qui règne dans les classes pendant les cours auxquels nous avons assisté. Avant de partir, il demande au directeur comment réagit le comité disciplinaire lorsqu'il y a des cas de harcèlement ou de violence au sein de l'école. Le directeur semble interloqué, il ne comprend pas vraiment de quoi il s'agit. Notre interprète lui explique en partageant une expérience de harcèlement dont avait été témoin le prof de math dans son école liégeoise. Nous avons ajouté des exemples de violences extrêmes dans des écoles en Europe ou aux États-Unis, avec des agressions d'élèves entre eux ou sur des profs impliquant des armes blanches et des armes à feu. Le directeur a répondu que les écoles en Chine ne connaissent pas ce genre de dérives. Nous avons répliqué que les jeux vidéos, les séries TV, les écrans prêtent autant à la violence en Chine que chez nous. Le directeur a simplement répondu que les GSM et les écrans sont prohibés durant toute la journée de cours et ne peuvent être utilisés qu'en fin de journée, et que lorsqu’un cas de violence se manifeste au sein de l'école, les parents sont immédiatement convoqués et des sanctions sont appliquées à l'élève en accord avec eux. Cela évite la violence et le harcèlement scolaire.

En sortant de l'école, à côté de la grille, un grand panneau explique les gestes élémentaires du recyclage des déchets et les principes élémentaires de protection de la nature et sauvegarde de la biodiversité du Tibet.

Panneau de recyclage et de protection de la nature
Panneau de recyclage et de protection de la nature